mercredi 20 janvier 2010

Une goutte de l'océan

De l'océan à la source
De la montagne à la plaine
Court le fantôme de la vie
L'ombre sordide de la mort
Mais entre nous
Une aube naît de chair ardente
Et bien précise
Qui remet la terre en état
Nous avançons d'un pas tranquille
Et la nature nous salue
Le jour incarne nos couleurs
Le feu nos yeux et la mer notre union
Et tous les vivants nous ressemblent

Tous les vivants que nous aimons
Les autres sont imaginaires

Faux et cernés de leur néant
Mais il nous faut lutter contre eux
Ils vivent à coups de poignard
Ils parlent comme un meuble craque
Leurs lèvres tremblent de plaisir

À l'écho de cloches de plomb
À la mutité d'un or noir
Un seul cœur pas de cœur

Un seul cœur tous les cœurs
Et les corps chaque étoile
Dans un ciel plein d'étoiles
Dans la carrière en mouvement
De la lumière et des regards
Notre poids brillant sur terre
Patine de la volupté
A chanter des plages humaines
Pour toi la vivante que j'aime
Et pour tous ceux que nous aimons
Qui n'ont envie que de s'aimer.


Paul Eluard (1895-1952)Poésie ininterrompue, I, v. 182-220 (1945)

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