Jean-Marie Carré qui, dans sa préface à La littérature comparée (QSJ ? no 499, 1951) de Marius François Guyard, affirmait : La littérature comparée n’est une comparaison littéraire. Mais si l’on récuse la comparaison, que faut-il évoquer pour définir la discipline ? Jean-Marie Carré mettait en avant « l’étude des relations spirituelle internationales », les « rapports de fait » et j’ai pour ma part proposé une définition : Au départ, la littérature comparée procède d’une prise de conscience, donc d’une problématique, de la dimension étrangère dans un texte, chez un écrivain, dans une culture. Comparer mais dans le sens d’un rapprochement. Ensuite, il a fallu faire la démarche inverse : procéder à une distinction, à une remise en évidence de différences, contentio étant employé en rhétorique dans le sens d’antithèse (Quintilien, IX, 3, 81). De fait, il s’agit de faire entrer des textes en dialogue, c’est-à-dire en coïncidence, en une sorte d’assemblage ; puis distinguer, séparer. Mises en parallèles et comparaisons aboutissant à la première littérature comparée illustrée par Villemain à la Sorbonne en 1828-1829 avec son « Tableau comparé » grâce auquel on pouvait voir « ce que l’esprit français avait reçu des littératures étrangères et ce qu’il leur rendit » à la série de comparaisons qui va se développer, d’un texte à l’autre, d’un ensemble ou d’une série à d’autres, et qui fournit la base de la synthèse, des axes, des lignes directrices qui non seulement permettent de passer d’un texte à un autre, mais de les lire comme un nouvel ensemble. Cette synthèse sera d’autant plus riche, variée qu’il y aura eu une réflexion non seulement sur les textes regroupés, mais de façon abstraite, théorique, sur des questions plus générales soulevées par le sujet retenu et qui ressortissent à la thématique, au mythe, à l’image, au genre, à la poétique, etc.
Le premier Cours de Littérature comparée de MM. Noël et De Laplace qui, dés 1816, offre déjà les deux défauts rédhibitoires de la discipline qui n’était pas même réellement née : la juxtaposition (en une suite de volumes consacrés aux littératures étrangères sous forme de leçons littéraires et morales) à laquelle il faut ajouter la comparaison spontanée, ingénue qui est suggérée mais non développée. C’est une démarche qui pourrait être envisagée comme une attention portée aux échanges, aux oppositions, aux dérivations, aux imitations, aux adaptations, en gros aux correspondances (homologie de contenu) ou homomorphies (correspondances formelles ou structurelles). Quant à la fameuse « influence » chère à l’ancienne littérature comparée, elle suppose bien des correspondances chronologiques (ou équivalences), des correspondances homologiques (transfert de thèmes, de motifs) et/ou des correspondances homomorphiques (transfert de genres formels, de procédés stylistiques).
Je souhaiterai accorder une place particulière au modèle proposé par Pierre Brunel dans le Précis de littérature comparée (PUF, 1989). Il y présente en ouverture les trois « lois » qui peuvent définir une méthode ou une lecture comparatiste : la loi d’émergence, la loi de flexibilité (le texte « tissu nouveau de citations révolues »), enfin la loi d’irradiation.
Mme L, Medjahed, Cours et TD de Littérature Comparée, 4ème année licence français, 15 Mai 2008.